EMMANUEL SIMON
Dans l’histoire de l’art, la question du travail en collectif ne date pas d’hier ! Déjà à la Renaissance, l’artiste ne travaillait pas seul, mais avec un atelier pour répondre plus efficacement aux commandes. L’exemple de Pierre-Paul Rubens, un des plus célèbres peintres flamands, est à ce sens parlant. En 1611 il raconte avoir déjà eu plus d’une centaine d’élèves, qui ont tous travaillé dans son atelier !
Des peintures telles que Le jugement de Pâris, sont avant tout des œuvres de l’atelier de l’artiste, sur lesquelles ce dernier effectue des retouches. En cela, elles peuvent être considérées comme des réalisations à plusieurs mains.
Aujourd’hui, la collaboration d’artistes répond à des questions bien différentes. Si autrefois, le travail en collectif répondait à des logiques économiques, dans l’art d’aujourd’hui, cette méthode est pensée dans un cadre plus philosophique. Travailler en groupe remet ainsi en question la notion de génie créateur produisant seul ses œuvres dans son atelier, poussé par une inspiration quasi-divine.
L’œuvre collaborative n’est donc pas masquée par la renommée d’un seul. À une époque où beaucoup d’artistes contemporains acquièrent un rang de superstar, le collectif d’artistes pense la création artistique à contre-courant de cette logique commerciale. Ce type de production bat ainsi en brèche la traditionnelle revendication du droit d’auteur, sur lequel tend à se baser le marché de l’art.
Emmanuel Simon et ses invité.es, rencontré.es dans la région Hauts-de-France, proposent dans cette exposition leur production commune, présentée sous la forme d’une édition. Les personnalités s’y affirment, se conjuguent, se parasitent parfois au travers de leurs créations respectives, qui, en se combinant, créent un objet hybride, entre espace d’exposition, œuvre collective et catalogue.
L’édition, distribuée au public tout au long de l’exposition, marque également une volonté du collectif de proposer une forme de diffusion alternative auprès des visiteurs.
La collection du Frac dispose de plusieurs œuvres de collectifs d’artistes. Présence Panchounette fut pendant 22 ans le « poil à gratter » du monde de l’art contemporain. Leur travail montre avec malice les mécaniques parfois cyniques d’un milieu qu’ils connaissent bien. Le lancement du refoulé illustre cela parfaitement avec cette relecture potache de l’histoire de l’art. La célèbre figure du discobole devient objet souvenir destiné à la consommation de masse, et jette des citations d’artistes et critiques d’art reconnus et célébrés, devenues décorations d’assiettes en céramique.