Présentation de l’œuvre « Chromosomes » de Gilles Conan, en présence de l’artiste
16.10.2021
Frac Grand Large — Hauts-de-France
Gillles Conan est autodidacte, ancien éclairagiste de danse contemporaine, formé à la protection de l’environnement (installations classées type Seveso).
Depuis vingt ans et à l’heure des grands basculements possibles vers l’abysse écologique, il envisage la lumière non seulement dans ses aspects cognitifs, physiques, énergétiques, phénoménologiques et communicationnels, mais aussi comme un élément qui nous rattache au fondement du vivant dans ce qu’il a de saisissant, de fugace, de fragile, de puissant et d’éphémère. En miroir de ces préoccupations, toutes les œuvres de l’artiste engagent une recherche de cohérence maximale entre la démarche, les moyens employés et le vocabulaire plastique.
Chromosomes, nouvelle œuvre de la série des autoportraits, acquise en 2021 par le Frac, sera dévoilée et projetée le samedi 16 octobre de 20h à 22h sur la façade de la Halle AP2.
série des autoportraits ( 2002 – 2021 ) / autoprojections de lampes par elles-même.
un projecteur de théâtre modifié est réglé de telle façon que l’intensité lumineuse produite par la lampe constitue la source qui diffuse sa propre image. l’ampoule projette de la lumière qui la projette se projetant elle-même.
cette mise en abîme relève d’une opération d’épure, de soustraction optique des incidences occultantes. la présence corpusculaire de la lampe, habituellement brouillée, se trouve ici révélée. par ce processus de dépouillement, cette mise en avant va à l’encontre de la fonction usuelle du projecteur qui se doit un faisceau le plus homogène possible; toutes ‘aberrations’ circonscrites.
or tout parait.
la lampe, littéralement à l’envers dans le corps du projecteur, se focalise sur elle-même et par un mécanisme de renversement de perspective impose son auto-affirmation. le phénomène est rendu possible par le miroir-réflecteur, qui, inversant l’image de ce narcisse, intervient comme outil de cette personnification. il lui reflète ainsi sa propre présence tout en activant son émancipation par projection. ainsi à l’opposé d’une camera obscura univoque dans sa captation du monde, le projecteur agit comme une camera obscura inversée, corollairement introspective puis prospective.
la lampe se décompose chirurgicalement par sa lumière : le squelette de la lampe, son contour, son(es) filament(s), ses broches; ainsi que son embase métallique interne et sa douille suivant réglages. figure d’une surface, d’un volume mais aussi d’une substance, l’image se propose à notre perception. sa prégnance spéculaire opère alors une cristallisation de l’irréel. l’apesanteur et la transparence spectrale de la lampe réitèrent un éphémère, suspendent un temps perpétuel. tangible et éthérée à la fois, cette image ambivalente ravive des impressions propres à la vision fantomatique des négatifs photographiques ou radiographiques.
en creux, sous l’autoprojection de la lampe se sédimente un autre autoportrait spéculaire, qui réduit l’humain à l’organique par des référents cliniques et anatomiques. la lampe utilisée pour la nuit blanche de paris en 2011 prend la forme théorique du colon, en u inversé ( encore ), de la façon dont il est représenté sur les manuels de médecine.
pour imbriquer aspirations et moyens, les leds constituent prioritairement les sources de mes interventions. la série des autoportraits, débutée en 2002, ne peut toutefois se concevoir sans l’emploi de lampes halogènes du fait de leur structure ‘anatomique’ et de leur charge symbolique.
standardisée en production, chaque lampe diffère de la précédente par de nombreux hasards de fabrication. elles acquièrent ainsi particularité et unicité qui se trouvent plus facilement révélées par le changement d’échelle.
le fait qu’une lampe de 500 w et de 10 cm de haut puisse s’octroyer quelques mètres de superficialité une fois autoprojetée renvoie par ricochet à la notion de vanité esquissée plus haut, d’autant plus que les lampes utilisées ont une durée moyenne de vie de quelques heures.
cette intention est renforcée par l’obsolescence énergétique de cette technologie dérivée directement d’edison et devenue incompatible avec les exigences cruciales d’efficacité environnementale.
leur qualité plastique, matérielle et immatérielle, donne au dispositif une qualité muséale, contraste vis-à-vis d’une disparition qu’il faut paradoxalement souhaiter prochaine et alimente l’installation d’une nostalgie par anticipation… par projection.
gilles conan – 2011
Date(s)
16.10.2021 — 16.10.2021
Horaires
20h
Public
Tout public
Tarif(s)
Entrée gratuite